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TAHITI / CHANSONS POPULAIRES

TAHITI / CHANSONS POPULAIRES

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FROM PAPPETE TO TESHUPO / CHANSONS POPULAIRE DE TAHITI
1 CD EPM

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CHANSONS TRADITIONNELLES DE TAHITI
From Papeete to Teshupo
 
ENSEMBLE TAHITIEN TAMARII-THAHITI

1PAPIO / Le manège
2 MANU E TOKERAU / L’oiseau du vent
 
ENSEMBLE TAHITIEN TAMARII-THAHITI
Mlle Matai & MM. Tihoti, Mootua, Ata

3 TAU TIARE ITI / Ma petite fleur
4 PARARI – PARARA / Crac crac !
5 UTE-UPA UPA
6 MAURUPU-PATAO /Merci Patao
 
ENSEMBLE TAHITIEN
Tihoti-Re & mElles Maeva, Matai & Tihoti

7 FIDJI
8 HO’I-MAI / Reviens
9 MERO TAHITI / Voix de Tahiti
10 EITA OE E HINAARO / Ce que tu n’as pas voulu
11 TE HAUTI A TE VAHINE TAHITI / À la manière de la vahiné
12 HIMENE POPAA BORA BORA / La chanson française de Bora Bora
13 PAOAS-HRO / Danse de Hiro
14 TA’U TIARE MAOHI / Ma sœur polynésienne
15 PAPARA ITI E / Petit papillon
16 TOTE O NAE / MA A O

LES CHANTEURS PACIFIQUES       
 
“Des voix ont chanté pendant un millier d’années, peut-être, sur des milliers d’îles, sans que l’on sache exactement par quel chemin elles ont pu voler et couvrir un espace aussi énorme ...ce fut un bruissement de beaux sons rauques ou plus doux, de rudes cadences ou souples, et une incessante mélopée...”
 
C’est par ces mots que commence le célèbre livre du poète Victor Ségalen, “Voix Mortes, Chants Maoris” (1907), dont le titre résume bien le propos : comme bien d’autres à différentes époques,  il considère la musique polynésienne dans son ensemble comme un art acculturé, assassiné par l’intrusion des Européens : “Viennent les hommes blancs : tout se défigure, tout se fausse, et d’abord la race elle-même. Une par une, les voix se taisent. Pis encore : celles qui subsistent ne parlent plus qu’en reniant tout leur passé. A Tahiti, aux Hawaï, aux Samoa, en Nouvelle-Zélande, elles s’affublent et se guindent de psalmodient catégoriques dérivées du redoutable choral luthérien...”     Gauguin n’avait pas dit autre chose...
Près d’un siècle plus tard, cette anthologie vient à point tempérer ce jugement sans appel. Tous les enregistrements ici réunis, issus de 78 tours, datent de plus de 50 ans - c’est à dire presque 200 après la “fatale découverte”...mais il faudrait être de bien mauvaise foi pour n’y entendre qu’un variante exotique du chant européen. Au contraire, ils nous projettent brusquement dans un monde magique, qui n’est certes plus ce “paradis du bon sauvage” tant célébré par les voyageurs au temps des “Lumières”,  mais  qui n’évoque que de bien loin notre univers musical familier...
Ces dernières années, la musique polynésienne est sortie du long purgatoire auquel l’avaient condamnée tant d’écrits nostalgiques et désabusés. Les enregistrements de chorales fascinantes se sont multipliés, et les festivals - surtout celui organisé chaque année à Papeete pour le 14 juillet - démontrent la vitalité d’un art vocal qui est avec la danse (n’en déplaise aux folkloristes bougons) la trace la plus vivace de l’identité tahitienne...
Ce n’est pas surprenant. Dès 1774 - sept ans après la découverte presque simultanée de Tahiti par l’Anglais Wallis et le Français Bougainville - le Capitaine Cook y note : “La musique a pour les Tahitiens beaucoup de charmes. Et quoiqu’ils montrassent une sorte de dégoût pour nos compositions savantes, les  sons mélodieux que produisait chacun de nos instruments en particulier, approchant davantage de la simplicité des leurs, les ravissaient de plaisir.(...) Des musiciens ambulants avaient deux flûtes et trois tambours...Ceux qui battaient du tambour accompagnaient la musique de leurs voix, et nous fûmes surpris de découvrir que nous étions l’objet de leurs chansons. Nous ne nous attendions pas à rencontrer, parmi les habitants sauvages de ce coin solitaire du globe, une profession pour qui les nations les plus distinguées par leur esprit et leur connaissance ont de l’estime et de la vénération : tels sont pourtant les bardes et les ménestrels de Tahiti.”
 
 
Dès 1840, les rites ancestraux - tous accompagnés de chants - étaient réduits à la clandestinité. Les missionnaires, catholiques et surtout protestants, détruisirent les instruments de musique traditionnels au même titre que les sculptures rituelles - ils n’étaient d’ailleurs pas très nombreux, en ces îles et atolls où le bois est rare et précieux. Flûtes nasales (“vivo”), conques, rhombes, sifflets, syrinx et trompes ont pratiquement disparu de Tahiti et des autres Iles de la Société, survivant ailleurs dans les Iles plus montagneuses. Des chatîments terribles (jusqu’à la pendaison) dissuadaient les récalcitrants, ceux qui refusaient le baptême, souvent repérés par leurs pratiques musicales. Les tambours (à fente ou à peau) ont néanmoins survécu, tardivement associés aux fêtes civiles et religieuses. 
L’arc musical monocorde (“utete”) ou à deux ou trois cordes (“ukeke”) a été remplacé par la petite guitare portugaise (“ukulele”) ou la guitare espagnole, dans l’accompagnement des chansons d’amour. 
Le chant comprenait jadis à Tahiti bien des genres différents. Le plus important était le chant épique dont le nom “mele” (étrangement proche du grec “melos”) désignait la musique au sens noble du terme. Mais il y avait aussi le “ute” (chanson à boire) et le “pahi” (chanson érotique), ainsi que des chants funèbres, louangeurs ou satiriques...
Toutes ces formes ont probablement participé, de près ou de loin, à l’éclosion du chant tahitien “moderne”. Son histoire commence vers 1815, quand les missionnaires ont déjà cru  faire du passé table rase et que nait l’”himéné” :
un chant choral religieux inspiré du modèle européen - principalement germanique - mais qui intègre la pratique polyphonique traditionnelle telle que la décrivent les voyageurs antérieurs. On en retrouve la trace jusqu’à nos jours, avec ses principales caractéristiques : prééminence des voix féminines qui précèdent les voix masculines (trois voix de part et d’autre), puis alternent  suivant un processus d’antiphonie systématique ; timbres “stridents et désagréables” (selon les premiers explorateurs), des “voix de nez” plutôt que les “voix de gorge ou de poitrine” auxquelles nous sommes habituées.
Le “parlé-chanté” (forme ancestrale du “rap” dont on trouvera un magnifique exemple dans “Pahoas Hiro” (plage 14) étonna Bougainville - premier ou deuxième “découvreur” de Tahiti. Il est évidemment associé à la danse, omniprésente dans toutes les manifestations du chant tahitien.
Le son fluide et mélodieux de la langue maorie est pour beaucoup dans le charme irrésistible de ce chant. Les voyelles y dominent dans la transcription, incapable de traduire la légèreté impalpable des consonnes qui scandent pourtant l’élocution comme les mouvements ondulants de la taille et des bras rythment les pas harmonieux des danseurs et des danseuses...
On ne peut s’empêcher de penser - en l’absence de toute théorie appuyée sur des analyses historiques précises - que cette fluidité, cette ondulation  témoignent de la continuité  toute naturelle du chant tahitien : au delà du choc des civilisations, le bruissement des vagues de l’Océan fut et restera pour toujours la référence unique de la musique polynésienne.
 
                                                                                           Hie’ae Te Anau
 
SINGERS OF THE PACIFIC
 
“For thousands of years, perhaps on thousands of islands, people have sung songs without our knowing exactly how they came there and were scattered over such a wide area…a murmuring of beautiful sounds, both husky and gentle, of compulsive or flowing rhythms, an incessant chant…”
 
The well-known book, “Voix Mortes, Chants Maoris” (1907) by poet Victor Ségalen opens with these words. The title says it all: like many others before him, he believed that Polynesian music overall had been robbed of its culture and killed by European influences: “With the arrival of the white man everything changed, everything became distorted, not least the people themselves. Worse still, those that remained spoke only to deny their past. In Tahiti, Hawaii, Samoa, New Zealand, they adopted the stilted forms typical of Lutheran choirs…” Gauguin was of the same mind.
Almost a century later, the aim of this anthology is to mitigate this judgement. All the present recordings, taken from 78s, date from over 50 years ago i.e. 200 years after the “fatal discovery”, yet they are not merely an exotic version of European singing. On the contrary, they plunge us into a magical universe which, while not the “paradise of the noble savage” dating back to the era of the Lumière brothers, is very different from the music we are familiar with.
During recent years, Polynesian music has managed to escape the long purgatory to which it was condemned by so many nostalgic and mistaken writers. There are numerous fascinating recordings of choirs and festivals—especially that which takes place every 14 July in Papeete—that reveal the continuing vitality of a vocal and dance art form, typifying the Tahitian identity.
This is not surprising for already in 1774—seven years after the almost simultaneous discovery of Tahiti by the English man Wallis and the French man Bouganville—Captain Cook spoke of the delight Tahitians took in music, pointing out that, although they did not greatly appreciate the more intellectual European compositions, they loved the melodic sounds produced on European instruments. He goes on to describe a group of travelling musicians who had two flutes and three drums. The drummers also provided the vocals and Cook and his companions were surprised to discover that they were singing about them. They did not expect to find among the natives of this far-flung corner of the world groups of bards and minstrels.
From 1840 onwards, ancestral rites accompanied by singing had to be carried out in secret. Catholic, and especially Protestant missionaries, destroyed traditional musical instruments, along with religious sculptures which were, in fact, quite rare because in these islands wood was a precious commodity. Nasal flutes (“vivo”), conches, rhombs, whistles, pan-pipes and horns have virtually disappeared in Tahiti and most other islands, surviving only in the most mountainous ones. Dreadful punishments, (including hanging) were inflicted on those who refused to be baptised, often detected through their musical instruments. Drums have, however, survived, only later associated with civil and religious festivals.
The single-chord musical bow (“utete”) or with two or three chords (“ukeke”) was replaced by the small Portuguese guitar (“ukulele”) or the Spanish one, in accompanying love songs.
Early Tahitian songs incorporated many different genres. The most important was the epic song, its name “mele” (strangely close to the Greek “mélos”) denotes music in the most noble sense of the term. But there was also the “ute” (drinking song) and the “pahi” (erotic song), as well as laudatory, satirical and funeral songs.
All these forms probably contributed, to a greater or lesser extent, to the birth of “modern” Tahitian singing which began around 1815, when the missionaries were already convinced they had swept away all vestiges of the past. The “himéné” was born: a religious choral song based on the European model—mainly Germanic—but which integrated the traditional polyphonics described by early travellers. Traces of this remain today, with its principal characteristics: dominance of female voices which precede the male voices (three of each) followed by s systematic antiphonal chant: “strident and unpleasant timbres” (according to the first explorers), “nasal voices” rather than “voices from the throat and chest” with which we are more familiar.
The “spoken/singing” form (an ancestor of rap of which Pahoas Hiro (track 14) is a magnificent example) astounded Bougainville. It is obviously associated with dancing, an integral part of all Tahitian music.
The flowing and melodious Maori language plays a large part in the irresistible charm of this type of singing. Vowels dominate the transcription, which can in no way convey the intangible lightness of the consonants that punctuate the delivery, as do the undulating hip and arm movements of the dancers.
It could be argued—although there are no previous detailed analyses to support this theory—that this fluidity and undulation is part of the natural continuity of Tahitian music. The murmur of the Pacific was and will always remain the unique reference of Polynesian music.
 
Adapted from the French by Joyce Waterhouse

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